C’est une bombe dans le champ des complémentaires santé (mutuelles, assurances et institutions de prévoyance) lancée par la Cour des comptes ce 21 juillet dans son enquête réalisée à la demande de la commission de l’Assemblée nationale en 2019. Dans un rapport au vitriol, les magistrats financiers mettent en avant « une couverture globalement coûteuse, parfois inéquitable, qui laisse de côté une part non négligeable de la population ».
Ce jugement intervient dans un contexte tendu depuis le début du quinquennat entre le gouvernement et les acteurs du secteur, marqué par plusieurs bras de fer autour de la mise en place du «100 % santé », la résiliation des contrats à tout moment et l’instauration de la « taxe Covid» exceptionnelle de 1,5 milliard. Ce constat dont nous dénonçons de nombreux points depuis plusieurs années arrive alors même que les dépenses de santé se sont envolées avec le Covid…
Le réveil est d’autant plus douloureux pour les OCAM que ces structures pensaient être intouchables et que depuis plusieurs décennies elles ne pensent qu’à imposer leur dictat oubliant pour la plupart d’entre elles que leur mission repose dans le seul bien vivre en bonne santé et l’accès aux soins de tous les français. Mutualité en tête, les dirigeants de ces institutions n’ont pensé qu’à piloter des regroupements pour créer des monopoles axés sur le profit et favoriser leurs egos personnels. Pour exemple il est aujourd’hui facile de constater que deux mondes ont été mis en opposition les actifs et les non actifs supprimant au passage toute mutualisation entre ces deux mondes et ce avec l’aval des partenaires sociaux qui aujourd’hui sont bien silencieux sentant leur influence se diluer au fil des réformes. Notre assurance maladie enviée dans le monde entier perd chaque année de ses ors et nous nous dirigeons tout droit vers un système universel qui créera ipso facto de nouvelles surcomplémentaires responsables d’une santé à deux vitesses.
La couverture de la population par une complémentaire santé a un « coût très élevé » de 10 milliards d’euros par an. Derrière ces 10 milliards, se cachent d’abord les niches fiscales et sociales accordées aux salariés et aux entreprises au titre de la complémentaire santé (plus de 7 milliards). A cela, la Cour ajoute le coût de la complémentaire santé solidaire dispositif permettant aux moins aisés de couvrir leurs dépenses non-couvertes par l’Assurance Maladie.
Pour la Cour des comptes, le système français de couverture de dépenses de santé a l’avantage de garantir un « reste à charge » pour les citoyens « particulièrement faible ». Il est « particulièrement coûteux en frais de gestion »alors qu’il existe « une forte imbrication » entre l’assurance maladie obligatoire et les assureurs santé, « il y a une superposition des dépenses de gestion administrative sur les mêmes flux ».
Selon la Cour, le système est aussi partiellement inéquitable, les complémentaires offrant « des conditions inégales à leurs assurés ». Le rapport prix/niveau des garanties de l’assurance est « très favorable » dans le secteur privé, où les salariés peuvent compter sur leur entreprise pour négocier au mieux avec les assureurs. En revanche, « les personnes âgées font face à des coûts parfois très conséquents résultant d’une tarification majoritairement liée à l’âge ». L’institution juge aussi que la complémentaire santé solidaire est un dispositif « complexe » et « inégalement protecteur ».
Pour corriger ses constats, la Cour propose trois scénarios d’évolution. Le premier consiste à plafonner le reste à charge après intervention du régime obligatoire. La seconde option consisterait à redéfinir le partage des rôles entre les complémentaires et la Sécurité sociale. La troisième piste avancée : « une régulation accrue des complémentaires », avec une plus grande standardisation des offres et un encadrement des frais de gestion (commerciaux et techniques). De quoi promettre de prochains mois mouvementés dans une période électorale de surcroit.
Conscient des inégalités d’accès aux soins Olivier Véran vient de confier au Haut Conseil pour l’Avenir de l’Assurance-maladie le soin de mener un chantier technique approfondi avec le soutien d’un groupe de travail inter-administratif afin de proposer plusieurs scénarios d’amélioration de l’articulation entre assurance-maladie de base et complémentaire. Il a précisé que ces scénarios de rupture méritent une expertise particulière pour en mesurer les effets et les risques ainsi que l’acceptabilité pour l’ensemble des acteurs et tout particulièrement les assurés. Si ce chantier est mené de bout en bout il peut être une chance pour nous tous de nous faire entendre et d’obtenir une réponse à nos revendications réitérées régulièrement depuis plusieurs décennies.